« Les CRESS au service du développement de l’ESS », un rapport remis à la Ministre Marlène Schiappa le 27 février 2023
Introduction du rapport
Le présent rapport, qui réalise un état des lieux du fonctionnement et des potentialités ouvertes par les Chambres Régionales de l’Economie Sociale et Solidaire (CRESS) en matière de soutien au développement de l’ESS, a été réalisé par ESS France à la demande de la Ministre Marlène Schiappa, Secrétaire d’État à l’économie sociale et solidaire et à la vie associative auprès de la Première Ministre Elisabeth Borne. Les travaux qui ont conduit à sa rédaction se sont tenus de décembre 2022 jusqu’à février 2023.
Il s’attache à la fois à donner une photographie des Chambres Régionales de l’ESS près de 10 ans après la reconnaissance de leurs missions par la Loi 2014-856 du 31 juillet 2014, ainsi qu’à identifier les potentialités qu’elles ouvrent et qui mériteraient d’être exploitées afin de soutenir le développement de l’ESS dans les territoires. Ce rapport s’est également attaché à mettre en exergue la place des différentes formes de financement des CRESS et notamment celle remplie par les crédits déconcentrés dans le cadre du financement de leurs missions socles attribuées par la Loi. Ces travaux sont menés de manière concomitante avec la démarche d’évaluation de la Loi de 2014 confiée par la Ministre au Conseil Supérieur de l’ESS (CSESS) et permettra d’irriguer certaines discussions, même si ce rapport fera l’objet de propositions en propres qui ne seront pas nécessairement à traiter dans le même calendrier.
Par ce rapport, ESS France cherche à donner une photographie claire de l’état des CRESS et de leur évolution sur des données comparables ces dernières années ainsi qu’à faire des propositions d’amélioration et qui concernent l’implication de l’État sur leurs activités. La démarche d’ESS France est voulue au service d’une vision de l’intérêt général, et pour défendre une approche raisonnée et opérante de l’écosystème de l’accompagnement qui doit se construire dans :
- Le respect des cadres les plus adéquats et les plus cohérents pour porter des dispositifs liés à la puissance publique,
- Une volonté de couverture équitable du territoire et d’accès au droit de l’ensemble des structures et porteurs de projets de l’ESS,
- L’optique de faire progresser la place de l’ESS dans notre économie française.
Un rapport détaillé en trois parties :
Partie 1 : Un réseau incontournable pour le développement de l’ESS dans les territoires
Depuis les années 60, les CRESS se sont progressivement structurées pour constituer un réseau de 17 entités, présentes sur l’ensemble des régions et rassemblant près de 1872 adhérents et 200 salariés, entièrement dédiés au développement de l’ESS dans les territoires. Les CRESS bénéficient de la reconnaissance de leur rôle d’ensemblier des acteurs régionaux de l’ESS par la loi et assurent des missions d’intérêt général ainsi que des projets au service du développement de l’ESS. Uniques dans leur légitimité et leurs périmètres, les chambres régionales sont devenues incontournables dans le déploiement des politiques publiques en faveur du soutien aux entreprises de l’ESS dans les territoires.
Partie 2 : Engagées au quotidien pour le développement de l’ESS malgré un financement fragile de leurs missions légales
La Loi de 2014 portait une ambition très forte pour les CRESS, notamment concernant les missions qui leur étaient confiées. Cependant, et comme l’avait pointé le rapport de l’Inspection Générale des Finances en 2016, certaines CRESS ont pu avoir du mal à jouer pleinement leur rôle. En effet, au lendemain de la Loi, les effectifs et budgets parfois réduits, ainsi que le processus de fusion des CRESS ouvert en 2015 pour répondre au redécoupage des régions, ont renforcé la difficulté pour les CRESS de « remplir leurs nouvelles missions » et de se « positionner conformément au rôle que la loi leur confie ». Aujourd’hui, l’ensemble des missions légales confiées au CRESS dans la Loi de 2014 sont mises en oeuvre. Nous reviendrons en détail sur ces différentes missions ci-dessous et sur l’engagement quotidien des équipes des CRESS pour faire progresser la place de l’ESS sur leur territoire.
Pourtant, ce rapport permet de pointer à nouveau le sous-financement structurel des missions légales des CRESS de la part de l’État. Sous-financement qui ne leur permet pas de déployer toute leur potentialité et de mettre en oeuvre une véritable politique publique de soutien de l’ESS dans les territoires.
Partie 3 : Préconisations en matière de soutien des Chambres Régionales de l’ESS afin d’accélérer le développement économique de l’ESS dans les territoires
L’ESS, par nature transversale et diverse, nécessite particulièrement un écosystème lisible et plus complet. Le coût d’accès à l’information en proximité est sans aucun doute un frein au déploiement de ce mode d’entreprendre. L’ESS connaît pourtant une visibilité importante et sans précédent imputable à la recherche d’un modèle économique orienté vers la production d’une valeur non réductible à la valeur monétaire et selon des modalités qui permettent de concilier les enjeux économiques, sociaux et environnementaux. Cette aspiration, en phase avec l’expression des attentes des citoyens, fait de l’ESS un appui sans équivalent des politiques publiques de développement territorial portées par les pouvoirs publics de toutes les échelles.
Les CRESS ne sont pas seules détentrices de cette opportunité, mais jouent un rôle pivot d’articulation et d’animation de la diversité des acteurs, et particulièrement pour faciliter la rencontre entre l’offre d’accompagnement existante et la demande des entreprises et porteurs de projets. Ce rapport a permis de mettre en lumière que les CRESS offrent un positionnement unique permettant à la fois :
- Une institutionnalisation et une reconnaissance légale de leur utilité et de leurs missions au sein de l’écosystème ;
- Une interlocution avec les collectivités territoriales depuis les EPCI jusqu’aux régions et une participation à la construction des schémas régionaux de l’ESS ;
- Une représentation, grâce aux statuts associatifs, de l’ensemble de la diversité de l’ESS en matière de diversité juridique et sectorielle ;
- Une couverture de l’ensemble du territoire de métropole et d’Outre-mer, ainsi qu’une représentation à l’échelle nationale ;
- Une vision de l’ensemble des problématiques et offre d’accompagnement déployées sur une région, et notamment en fonction des types de structures, secteurs d’activité ou niveau de besoin (État de développement – essaimage, stabilisation, développement) ;
- Des compétences transversales permettant d’associer de l’observation, du développement économique, de la promotion de l’ESS ainsi que de l’animation territoriale.
En ce sens, ce rapport propose dans un premier temps, afin de répondre au morcellement et à l’illisibilité de l’écosystème de l’accompagnement, que l’Etat confie aux CRESS, à l’appui d’un financement par crédits déconcentrés, de manière nationale avec un déploiement territorial, une mission d’accueil, d’information et d’orientation (AIO) au service des porteurs de projets et entreprises de l’ESS.
Ce rapport formule au total cinq préconisations qui permettent de soutenir et d’envisager le rôle pivot des CRESS dans le développement économique, social et environnemental de l’ESS dans les territoires.
D’autres propositions seront également présentées dans le cadre de l’évaluation de la loi de 2014, notamment en ce qui concerne la place des CRESS dans la construction des politiques publiques territoriales de l’ESS ou encore sur les moyens dont l’ESS bénéficie pour se développer et s’engager dans les transitions nécessaires à notre économie.